Un rap d’espoir sous les bombes de Syrie – Un si Proche Orient, un article de Le Monde.fr – Actualités et Infos en France et dans le monde

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Le rappeur syrien Amir al-Muarri vient de lancer, depuis l’enclave bombardée d’Idlib, un message d’espoir et de résistance auquel des dizaines de civils ont contribué.

Amir al-Muarri, lors du récent tournage du clip « Sur tous les fronts »

Le soulèvement démocratique qui a traversé le monde arabe en 2011 a souvent été scandé par des rappeurs militants, dont les textes relayaient avec une virulence rare les aspirations des manifestants. En Syrie, de nombreux artistes ont choisi le rap pour exprimer leur engagement révolutionnaire. Le rappeur damascène Bu Kolthoum a été forcé de se réfugier en Jordanie, en 2013, avant de rejoindre les Pays-Bas de longues années plus tard. Les deux frères qui constituent les Refugees of Rap sont nés dans le camp palestinien de Yarmouk, dans la banlieue de Damas, et ont dû le quitter en 2014 pour s’installer finalement en France. Comme eux, la plupart des rappeurs ont été contraints de s’exiler, même si leur souhait le plus cher est de pouvoir un jour rentrer en Syrie.

L’ENCLAVE ASSIEGEE D’IDLIB

Le rappeur Amir al-Muarri a, quant à lui, choisi de quitter Istanbul où il s’était réfugié pour revenir dans l’enclave d’Idlib dont il est originaire. La mort de son frère, tué en tentant de franchir la frontière rigoureusement gardée avec la Turquie, a précipité le retour d’Amir. Devenu à vingt ans l’aîné de la famille, il assiste son père, très affaibli, et prend en charge ses trois frères et soeurs. La poche d’Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie, abrite trois millions de personnes, dont la moitié y ont trouvé refuge depuis le reste du pays. Le régime Assad, lourdement appuyé par l’aviation russe, a lancé en avril dernier une offensive sans précédent contre la province d’Idlib. Au moins un millier de civils ont déjà été tués, tandis que des centaines de milliers de personnes ont été contraintes par les bombardements de se réfugier ailleurs dans l’enclave, la Turquie ayant durci ses contrôles pour éviter un nouvel exode sur son territoire. C’est ainsi qu’Amir al-Muarri et sa famille ont dû encore récemment trouvé un nouvel abri, chassés qu’ils étaient par les pilonnages.

LE DEFI D’UN RAPPEUR AUX JIHADISTES

Amir al-Muarri a ramené de Turquie un micro et un ordinateur portable, constituant à son retour en Syrie un studio de fortune. Il a choisi, pour son premier clip, de se faire le porte-parole de la population d’Idlib, tout autant opposée au régime Assad qu’aux milices jihadistes qui quadrillent l’enclave. Intitulé dans cet esprit « Sur tous les fronts », la vidéo est marquée par la participation de 62 femmes et hommes. Elle s’ouvre par le constat du piège qui s’est refermé sur les civils d’Idlib: « Voici le terrain de jeu du dirigeant russe/Où tu dois choisir entre le régime et Al-Qaida/Choisis un de ses deux camps et leurs missiles t’épargneront ».

Le rappeur est particulièrement sévère à l’encontre de la milice dominante à Idlib, Hayat Tahrir al-Cham (HTC), elle-même issue de la branche syrienne d’Al-Qaida. Il fustige les « menteurs fondamentalistes » et leur police des moeurs: « Tous ces hypocrites parlent comme s’ils avaient la religion pour eux/L’un se prétend calife, l’autre tranche ce qui est bien ou mal/Une vraie mascarade politique/Nul besoin de niqab, cette terre est pure ». La ville natale d’Amir, Maarat al-Nomane, a été le théâtre de protestations populaires contre HTC, le drapeau à trois étoiles de la révolution syrienne étant brandi par les manifestants, en lieu et place du drapeau noir des jihadistes. Mais l’intensification du conflit, cet été, a largement vidé Maarat al-Nomane de ses habitants. D’où l’accusation du rappeur à l’encontre « du régime et d’Al-Qaida » qui s’entendent de fait aux dépens de la population, contrainte, elle, de se battre « sur tous les fronts ».

SOLIDARITE AVEC LES RAPPEURS RUSSES CONTRE POUTINE

Depuis « le terrain de jeu » de Poutine qu’est devenu Idlib, Amir al-Muarri stigmatise le double langage du Kremlin: « Un jour il envoie des délégations de paix/Le lendemain, il détruit un camp de réfugiés sous les bombes ». Le rappeur syrien affiche dès lors sa solidarité avec les rappeurs russes que Poutine voudrait réduire au silence: « Ils ont arrêté Husky qui dénonçait leur politique/Ils ont interdit les concerts de GONE.Fludd et de (Pochlaya) Molly/Ils ne veulent que des rappeurs qui encensent leur leader/Ils accusent les autres de soutenir le terrorisme/Combien de rappeurs Poutine a-t-il mis en prison?/Pendant que les médias célèbrent des imposteurs bien en cour ». Cette solidarité inédite entre rappeurs arabes et russes a été remarquée sur les réseaux sociaux en langue russe, bien au-delà de la problématique proprement syrienne.

Reste ce message lancé par un Syrien de 20 ans, déraciné sur sa propre terre, où il est menacé par les bombardements des uns et les diktats des autres. Un message lancé depuis cette enclave d’Idlib dont les habitants confiaient déjà au « Monde », cet été, leur sentiment d’abandon. Un message d’espoir et de résistance, porté par des dizaines de civils anonymes.



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